Certains aliments considérés comme « sains » peuvent s’avérer dangereux: « L’acide linoléique stimule la croissance des cellules cancéreuses »

Une récente étude américaine publiée dans la prestigieuse revue Science vient bousculer certaines idées reçues sur l’alimentation saine. Les chercheurs de Weil Cornell Medicine ont identifié un lien direct entre la consommation excessive d’acide linoléique, un acide gras oméga-6 présent dans de nombreux aliments considérés comme bénéfiques, et l’accélération de la croissance de certaines tumeurs mammaires. Cette découverte pourrait avoir des implications majeures pour les recommandations nutritionnelles destinées aux patients atteints de cancer.

Les acides gras essentiels: un équilibre délicat

Les acides gras sont souvent présentés comme des éléments indispensables à une alimentation équilibrée. Parmi eux, les oméga-6, et notamment l’acide linoléique, sont considérés comme « essentiels » car notre organisme en a besoin mais ne peut pas les synthétiser lui-même.

Ces acides gras jouent un rôle crucial dans plusieurs fonctions physiologiques fondamentales:

  • La croissance cellulaire
  • La santé osseuse
  • Le développement et le fonctionnement du cerveau

On les trouve naturellement dans de nombreux aliments généralement recommandés dans le cadre d’une alimentation équilibrée:

  • Les œufs
  • Les huiles végétales (tournesol, maïs, soja)
  • Les noix et autres fruits à coque
  • Le tofu
  • Différentes variétés de graines

Cependant, comme le souligne cette nouvelle étude, la surconsommation de ces acides gras pourrait avoir des effets néfastes jusqu’alors méconnus.

Une consommation qui a explosé dans les pays occidentaux

La consommation d’acides gras oméga-6 a connu une augmentation spectaculaire dans les pays occidentaux depuis les années 1950. Ce phénomène est principalement attribué à la popularisation des produits alimentaires ultra-transformés, souvent riches en huiles végétales à forte teneur en acide linoléique.

Cette évolution a créé un déséquilibre nutritionnel important entre les oméga-6 et les oméga-3, ces derniers étant connus pour leurs effets anti-inflammatoires et leurs bénéfices sur la santé cardiovasculaire, cérébrale et oculaire.

Le ratio idéal entre oméga-6 et oméga-3 devrait être d’environ 4:1, mais dans l’alimentation occidentale moderne, il peut atteindre 15:1, voire 20:1, favorisant potentiellement un environnement pro-inflammatoire dans l’organisme.

Un lien direct avec le cancer du sein triple négatif

L’étude publiée dans Science s’est spécifiquement intéressée au cancer du sein triple négatif, une forme particulièrement agressive qui représente environ 15% des cancers mammaires. Cette variante se caractérise par l’absence des trois récepteurs habituellement ciblés par les traitements standards, ce qui la rend plus difficile à traiter.

Les chercheurs ont mené leurs expériences sur des souris atteintes de ce type de cancer. Les résultats sont frappants: les tumeurs des souris nourries avec un régime riche en acide linoléique, notamment en huile de carthame, se sont développées significativement plus rapidement que celles des souris témoins.

« Nous savons maintenant que l’acide linoléique stimule la croissance des cellules cancéreuses de manière très spécifique », explique le principal auteur de l’étude, le docteur John Blenis, dans un communiqué officiel.

Un mécanisme biologique précis identifié

L’équipe de recherche a réussi à élucider le mécanisme précis par lequel l’acide linoléique favorise la croissance tumorale dans le cancer du sein triple négatif:

  1. Les tumeurs triple négatives produisent en grande quantité une protéine appelée FABP5 (Fatty Acid Binding Protein 5)
  2. Cette protéine sert de transporteur à l’acide linoléique au sein de la cellule cancéreuse
  3. L’acide linoléique est ainsi acheminé vers une voie de signalisation cellulaire nommée mTORC1
  4. Cette voie agit comme un « centre de contrôle » qui régule la division cellulaire, la croissance et la production de protéines
  5. En présence d’un excès d’acide linoléique, mTORC1 est suractivée, accélérant la prolifération des cellules cancéreuses

Ce phénomène n’a été observé que dans les tumeurs triple négatives, où la protéine FABP5 est surexprimée, ce qui explique la spécificité de cette découverte.

Vers une nutrition personnalisée pour les patients atteints de cancer

Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives dans la compréhension des liens entre alimentation et cancer, et pourrait conduire à des recommandations nutritionnelles plus ciblées.

« Cette découverte contribue à mieux comprendre le lien entre l’alimentation et certains cancers, et surtout à identifier les patientes qui pourraient bénéficier de recommandations nutritionnelles plus personnalisées », précise le Dr Blenis.

Pour les patientes atteintes d’un cancer du sein triple négatif, cette étude suggère qu’une réduction de la consommation d’aliments riches en acide linoléique pourrait potentiellement ralentir la progression tumorale, en complément des traitements conventionnels.

Cette avancée souligne l’importance d’une approche plus nuancée de la « nutrition saine », qui prendrait en compte les spécificités individuelles et les conditions médicales particulières de chaque personne, plutôt que de proposer des recommandations génériques.

📩 Ne manquez aucune actualité !

Recevez directement dans votre boîte mail des conseils et les dernières mises à jour d’Oncostar.

Votre adresse e-mail ne sera utilisée que pour vous envoyer nos actualités. Vous pouvez vous désinscrire à tout moment.